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Étudions deux incroyables parties de Capablanca
Jose Raul Capablanca. Image via Wikipedia.

Étudions deux incroyables parties de Capablanca

Gserper
| 40 | Stratégie

Les parties de Jose Raul Capablanca ont été analysées dans d’innombrables livres d'échecs, magazines et vidéos.

Mais aujourd'hui, j'aimerais vous montrer deux parties moins connues du génie cubain. Les deux ont été jouées contre le fort maître américain Alexander Kevitz, et sont exceptionnelles pour des raisons très différentes.

La première est absolument incroyable, mais malheureusement, elle est aussi très mauvaise... Je pense même qu'il s'agit de la plus mauvaise partie jouée par Capablanca de toute sa vie, lui qui a appris les règles des échecs à l'âge de quatre ans !

Jugez-en par vous-mêmes : 

C'est vrai, il s'agissait d'une simultanée contre 33 joueurs, mais tout de même, il était alors champion du monde, et il avait les blancs ! Je pense que même un 1000 Elo aurait honte de jouer une telle partie ! J'ignore ce qui s'est passé, et cette partie reste pour moi un des plus grands mystères de l'histoire des échecs.

Lorsque Capablanca rejoua Kevitz, lors d'une partie de compétition plus sérieuse, les choses commencèrent à nouveau très mal pour le cubain.

Eh oui, Capablanca, celui que l'on surnommait la machine en raison de son jeu quasi-parfait, gaffe un pion dès la sortie de l'ouverture, dans une position pourtant simple ! L'histoire allait-elle se répéter ? Dans la simultanée, les ennuis de Capablanca avaient en effet commencé lorsqu'il avait gaffé un pion, dès le cinquième coup ! 

Mais pas d'inquiétude, toute la beauté de cette partie va bientôt être révélée.

Imaginez un fort maître comme Kevitz, jouant les blancs, et perdant la partie sans la moindre erreur visible. Difficile à imaginer, pas vrai ? Pourtant, observez la suite !

Jose Raul Capablanca

Capablanca jouant une simultanée contre 30 joueurs. Berlin, Juin 1929. Image : Wikipedia

Cette partie est maintenant l'exemple typique d'une mauvaise position pour les noirs. Dans ce genre de situation, il faut se rappeler qu'on ne peut survivre que si son adversaire fait des erreurs, même des petites. Votre but est donc de l'aider un peu !

Le meilleur moyen de pousser votre adversaire à la faute est souvent de compliquer la position. Si vous pouvez attaquer son roi, ne vous en privez surtout pas, et si vous avez un pion passé, poussez-le ! Cependant, parfois, vous n'aurez hélas aucun contre-jeu, comme Capablanca dans cette partie. Dans ce cas, que faire ?

Il faut que vos pièces embêtent votre adversaire, ou, au pire, qu'elle aient l'air de l'embêter ! Essayez de deviner les deux prochains coups du Maestro. Et n'oubliez pas le mot d'ordre : soyez pénibles !

Eh oui, la dame en a3 est très pénible pour les blancs ! Elle met la pression sur le pion a2, empêchant les blancs de s'emparer de la colonne c par Tac1. Bien sûr, la position noire est toujours mauvaise, mais au moins, ils commencent à poser quelques problèmes aux blancs.

Essayez maintenant de trouver le prochain coup de Capablanca :

Contrairement à la plupart des joueurs, qui lancent des manœuvres désespérées dès qu'ils se retrouvent dans une mauvaise position, Capablanca continue simplement de jouer aux échecs. Le cavalier e3 empêche la tour c8 de se poster sur la seconde rangée, et menace de s'installer en d5 au moment opportun. Capablanca choisit donc de l'échanger !

Notez également qu'après avoir gaffé leur pion central, les noirs ont malgré tout échangé trois pièces mineures. C'est le contraire de ce que la plupart des joueurs feraient dans cette position ! En effet, c'est l'une des première chose que l'on apprend aux échecs : les échanges avantagent généralement le camp ayant un avantage matériel.

J'ai souvent vu des jeunes joueurs qui, dès qu'il remporte du matériel, commence à vouloir engager une série d'échanges frénétique. Dans cette quête, ils ratent inévitablement les continuations les plus favorables, oubliant dans leur obsession que le but du jeu n'est pas d'échanger les pièces, mais de mater le roi adverse !

En réalité, que vous soyez mieux ou moins bien au niveau matériel, il s'agit toujours d'une partie d'échecs. Si vous échangez des pièces, il faut que ce soit parce que la position le demande. Et c'est ce que fait ici Capablanca.

Il commence ensuite à créer du contre-jeu. Parviendrez-vous à trouver comment ?

En fixant un pion faible sur a2, Capablanca s'assure de compensations à long terme pour le pion perdu. En outre, il peut maintenant échanger les dames ou les tours, le pion devenant encore plus faible dans ce cas.

Les blancs vont essayer de générer une attaque sur l'aile roi en poussant leur majorité de pions, mais Capablanca pare la menace avec une grande précision. Saurez-vous trouver ses coups ?

Les noirs ont maintenant pris le contrôle de la position. Les blancs peuvent encore tenter de défendre, mais Alexander Kevitz, visiblement affecté, gaffe presque immédiatement la partie

Je terminerai en citant le célèbre joueur de base-ball Yogi Berra "On peut observer beaucoup de choses juste en regardant."

J'espère qu'étudier la manière dont Capablanca a joué après avoir gaffé un pion vous aidera à développer vos talents de défenseurs !

Mieux connaître GM Gserper
Les échecs sont un art !

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